Bibliothèque Malawi

Edouard FOA – 1898 – Traversée de l’Afrique équatoriale

Edouard Foa, 1898 - Traversée de l'Afrique équatoriale de l'embouchure du Zambèze à celle du Congo, par les grands lacs

Extrait de l’ouvrage :


Nous reprenons notre voyage, en passant rapidement sur ce qui est déjà connu, pour continuer à décrire que les parties nouvelles. En 1896-1897, nous faisons la navigation du lac Nyassa sur une petite canonnière, Le Pionnier, mise obligeamment à notre disposition par M. Alfred Scharp, commissaire de Sa Majesté britannique au Nyassaland. J’ai fait, pendant ce voyage, des observations astronomiques sur les principaux points du lac avec le capitaine Rhoads de la canonnière, et ces observations auront pour résultat de modifier assez sensiblement la carte du lac. Le lac Nyassa a absolument l’aspect d’une mer et généralement d’une mer houleuse. Tout autour sont de hautes montagnes qui ajoutent encore à l’illusion; la couleur des eaux est la même, les vagues brisent sur les rochers comme l’océan et le milieu du lac a des profondeurs insondables.Pour donner une idée de son étendue je dirai que le lac Nyassa a plus de 300 milles de long sur 60 de large, c’est-à-dire 500 kilomètres sur 90, à peu près la moitié de la longueur de la France sur 90 kilomètres de large. Vous voyez que des escadres pourraient y évoluer et s’y perdre. D’ailleurs, en certains points, vers le milieu du lac, on voit à peine l’horizon. Nous avons eu du gros temps pendant tout le voyage, 9 jours environ. Je n’insisterai pas sur l’état dans lequel la traversée a mis les indigènes de l’expédition; sur le bateau de Calais à Douvres, vous voyez tous les jours de ces gens pour lesquels l’existence est devenue un lourd fardeau et qui se tiennent près du bastingage pour… contempler les petits poissons… et les nourrir.

Mes hommes déclaraient que jamais de leur vie ils ne remettraient les pieds sur un bateau et j’ai eu à plusieurs reprises, toutes les peines du monde à les faire rembarquer lorsqu’il étaient à terre : je crois n’y avoir réussi que parce qu’ils avaient encore plus peur de rester en pays étranger que de revenir à bord de la canonnière.

Mais nous débarquons à Karonga, au nord du lac Nyassa, et nous commençons l’ascension du plateau Nyassa-Tanganyika qui est très pénible pour les porteurs. Si l’on songe, en effet, que dans l’espace de trois jours nous avons à passer d’un niveau de 500 mètres à celui de 1600 à 1700 mètres, on comprendra que ce n’est pas une montée ininterrompue; les sentiers, en certains endroits, sont tout ce qu’il y a de plus difficile et les hommes trébuchent à chaque instant sur les pierres roulantes. Enfin, le quatrième jour au matin, nous voyons devant nous, non plus des montagnes sans fin, mais l’horizon découvert à perte de vue avec un rideau de montagnes bleuâtres sur notre droite et sur notre gauche, et une étendue immense et ondulée de forêts basses : c’est le plateau de Niassa-Tanganyika.

Comme il y a là une vieille route de caravanes qui suit tout le plateau, nous la quittons dans notre amour pour l’inconnu et nous nous enfonçons dans la région qui est à l’ouest, le pays des Aouembas. J’arrive ici à l’une des parties les plus importantes de ce long voyage que je vais essayer de vous décrire de mon mieux, car au point de vue géographiqueje crois qu’elle a une grande importance. Avant de commencer, je dois dire que notre camarade, M. de Borely, fatiguer par les fièvres, épuisé par les fatigues du voyage, nous a quitté au lac Nyassa pour rentrer en Europe par le Chiré et le Zambèze; je dois ajouter qu’il s’est heureusement remis peu après son arrivé en Europe.

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